01/03/2001
La Défense des Forêts Contre les Incendies est basée sur l'attaque des feux naissants. Un verre d'eau suffit dans les premières secondes pour éteindre un feu, au bout de quelques minutes il faut un seau d'eau, après dix minutes un Camion Citerne Forestier (3 000 litres), ensuite c'est une véritable bataille contre un fléau en mouvement.
Depuis plus de cinquante ans la Défense des Forêts Contre les Incendies (DFCI) dans le massif des Landes de Gascogne s'appuie sur la complémentarité entre la prévention (associations syndicales autorisées de DFCI) et la lutte active (corps de sapeurs-pompiers) pour attaquer les feux dès leur éclosion.
Le réseau des tours de guêt (au nombre de 47) permet la détection rapide des panaches de fumées. Le réseau des pistes (40 000 km) et des ponts entretenus par les sylviculteurs permet aux secours d'accéder au plus près du départ d'incendie et d'attaquer directement le feu depuis les véhicules au cœur du peuplement forestier. Cette technique de lutte depuis le véhicule (le porte-lance arrose en restant sur le camion sans descendre) est très particulière au sud-ouest de la France, elle permet une mobilité des lignes d'attaque souvent nécessaire dans la circonscription d'un fléau en évolution.
La tempête de décembre remet en cause les techniques habituelles de lutte particulièrement dans les zones les plus sinistrées Médoc, Nord Gironde et Dordogne.
D'une part les parcelles sont impénétrables en raison des chablis, les secours ne pourront combattre sans réaliser d'établissement, c'est-à-dire, sans avoir à dérouler les tuyaux pour atteindre les flammes. Dans les peuplements encombrés, l'engagement des véhicules est souvent dangereux voire impossible. Il est alors nécessaire de combattre le feu depuis les pistes. Ceci pose alors le problème "des sautes de feu", qui peuvent enflammer les peuplements situés derrière les secours et les prendre à revers.
D'autre part le réseau de pistes et de ponts utilisés pour accéder aux parcelles est fortement endommagé par l'exploitation nécessaire des chablis pendant des conditions hivernales exceptionnellement pluvieuses. Dans le nord du Médoc, 70% des pistes principales comportent un passage infranchissable par les véhicules de secours. Dans ces conditions, la vitesse d'accès aux départs de feu, point clé de la lutte active, s'en trouve considérablement ralentie : les incendies peuvent prendre de la puissance avant que les secours n'y accèdent.
Il faut ajouter à cela l'augmentation de la masse de combustible au sol dans les zones de chablis (houppiers, végétation herbacée non éliminée en 2000, qui s'est généralement très bien développée en raison de l'absence de couvert végétal), ainsi que le caractère sec de ce combustible. La combinaison de ces deux facteurs rend les feux de printemps rapides et particulièrement redoutés des secours.
L'accessibilité des pistes et des parcelles est particulièrement compromise par le mauvais état du réseau hydrographique. Les pistes sont avant tout des voies d'accès en forêt hors d'eau, ceci est possible grâce au réseau de fossés aériens qui permet le drainage des parcelles et de la bande de roulement des pistes. Ce réseau de fossés est aujourd'hui obstrué ou détruit par des ornières. L'écoulement ne pouvant se réaliser dans les conditions habituelles, de nombreuses pistes sont inondées et certaines parcelles impraticables : les secours risquent de s'y enliser.
Lors de la campagne 2000 le nombre de départs de feux en Gironde fut exceptionnellement faible, 75% du nombre de départs moyens depuis 1986. Ces chiffres s'expliquent par la bonne répartition de la pluviométrie. Sur quelques chantiers seulement, les secours furent confrontés aux problèmes de chablis. Ces feux nécessitèrent l'utilisation d'engins de travaux publics pour permettre aux camions de contourner le feu.
La clémence de la campagne 2000 ne doit cependant pas masquer le fait que le Massif gascon est une zone à haut risque pour les feux de forêt : le département de la Gironde est le deuxième département français en terme de départ de feu. Cette forte pression et les conditions exceptionnellement difficiles en raison des chablis, impliquent une mobilisation de tous : sylviculteurs, sapeurs pompiers, services de l'Etat et collectivités territoriales.
Les incendies du PORGE en 1989 (3 800 ha brûlés), de CARCANS en 1990 (5 636 ha brûlés) rappellent les conséquences désastreuses que peut avoir le feu sur le Massif des Landes de Gascogne.
La garde du feu, prolongement de la lutte contre l'incendie, est également essentielle : des reprises de feux peuvent être favorisés compte tenu de la quantité de combustible au sol.
Les premiers feux ont déjà débutés : 45 hectares à Herm (Landes) le 7 février, 30 hectares à Arsac (Gironde) le 18 février. Il faut rester vigilant en respectant la forêt et mettre en oeuvre les moyens en adéquation pour sauvegarder le Massif des Landes de Gascogne particulièrement vulnérable depuis la tempête de décembre 1999. La campagne feu de forêt 2001 s'annonce difficile !
Source : Pierre Macé, directeur de la fédération girondine de DFCI ardfci@alienor.fr
Pour plus d'informations : http://www.dfci-aquitaine.org (Lien externe)
Les autres articles de Mars 2001 :
Mon compte